Corporate 13/07/2022

« Les assureurs et les pouvoirs publics doivent collaborer plus étroitement pour que les conséquences des catastrophes naturelles restent gérables »

Un an après  les inondations : interview avec Heidi Delobelle et Edwin Klaps 


Un an après les inondations dévastatrices qui ont particulièrement touché la Wallonie, AG fait le point. Quelle est l'ampleur des dommages ? Où en est le règlement des sinistres ? Quels sont les principaux enseignements à en tirer ? Mais surtout, comment éviter de telles catastrophes à l'avenir ou du moins en limiter l'impact ? Découvrez ci-dessous les réponses dans un entretien avec Heidi Delobelle, CEO, et Edwin Klaps, Managing Director Non-Life.

Edwin, pouvez-vous faire un bref état des lieux ?
 

Edwin: AG est de loin le plus grand assureur habitation du pays, ce qui se traduit par des statistiques de sinistres sans précédent dans cette catastrophe. Pas tant au niveau du nombre de demandes d'indemnisation - nous en recevons davantage lors de certaines tempêtes violentes - mais en termes de gravité des dommages. 

AG a ouvert près de 20.000 dossiers dans le cadre des inondations, près de 19.000 pour des habitations et un bon millier liés à des assurances auto. Mais c'est surtout l'ampleur des dégâts qui donne des chiffres sans précédent. Nous estimons que nous verserons à nos clients un total d'environ 480 millions d'euros dans le cadre de l'assurance habitation, ce qui représente une charge de sinistres moyenne de plus de 25.000 euros par dossier. C’est tout simplement énorme ! Nous verserons même plus de 75.000 euros dans près de 2.000 dossiers. 


Et où en est le versement de ces indemnisations ?

Edwin: Je voudrais tout d'abord souligner les énormes efforts déployés pendant de nombreux mois par l'ensemble de nos collaborateurs, tant les gestionnaires de sinistres internes que nos experts, qui se sont rendus sur les lieux pour plus de 12.000 dossiers. Tout le monde s'est vraiment plié en quatre pour faire face aux très nombreux dossiers graves. Nous voyons le bout du tunnel, mais il y a encore du pain sur la planche dans un millier de dossiers. À la fin du mois de juin, 93 % des demandes d'indemnisation avaient déjà été payées en totalité ou à hauteur d'au moins 80 %. Dans bien des cas, nous attendons encore les factures pour indemniser la TVA. Au total, nous avons déjà versé 418 millions d'euros sur les 480 millions prévus dans le cadre de l'assurance habitation.
 

Chiffres inédits (situation au 30 juin 2022)

 

- 18.845 demandes d'indemnisation pour des dommages aux habitations 
- 1.142 demandes d'indemnisation pour des dommages aux véhicules
- Un total de 480 millions d'euros d'indemnisations de sinistres prévu (habitations)
- 418 milions d'euros déjà versés (dommages aux habitations)  
- 25.250 euros coût moyen par sinistre (habitations)
- 1.907 demandes d'indemnisations > 75.000 EUR
- 93% des demandes réglées ou remboursées à plus de 80 % 




Qu'en est-il des autres dossiers en cours ?

Edwin: Ici on parle donc de ce millier de dossiers dans lesquels on est moins avancé. . Il s'agit soit de dossiers très graves, pour lesquels la reconstruction est toujours en cours et nous versons des indemnités au fur et à mesure de l'avancement des travaux. Ou bien il s'agit de plus petits dossiers qui sont bloqués sur le plan administratif, par exemple parce que nous attendons toujours des documents du client ou de la banque. Mais nous les suivons également de manière proactive.

Avec le recul, quelles leçons tirez-vous de cette période ?
 

Heidi: Tout d'abord, il faut tenir compte du fait que nous parlons d'une catastrophe d'une ampleur sans précédent en Belgique. Vous avez beau disposer des plus grands réseaux d'experts, de programmes d'accueil d'urgence, de réparateurs, de plans de crise, etc., rien ne peut entièrement vous préparer à une telle catastrophe.



Edwin: Néanmoins, en toute modestie et eu égard aux victimes, je pense que notre gestion des sinistres a très bien fonctionné dans des circonstances très difficiles. Bien sûr, il est toujours possible de faire mieux et nous y travaillons. Le talon d'Achille de ce processus est et reste l'expertise sur place. Même si nous disposons du plus grand réseau d'experts internes, nous cherchons toujours des moyens d'augmenter la capacité en cas de catastrophe majeure. 
Des gains d'efficacité peuvent également être réalisés au niveau sectoriel en passant de meilleurs accords pour les réparations d'envergure. Par exemple, lors de cette catastrophe, AG a coordonné les travaux de démolition de 36 maisons à Pepinster. En regroupant ces travaux, la démolition a pu être effectuée bien plus rapidement et efficacement, et les victimes ont également été indemnisées bien plus vite.

La question principale est maintenant de savoir si et comment le risque de catastrophes naturelles peut continuer à être assuré à l'avenir. Quel est votre avis à ce sujet ?

Edwin: À court terme, il est important de disposer d'un cadre légal adapté. Et de préférence le plus tôt possible, car les catastrophes naturelles ne tiennent pas compte des moyennes statistiques. Il faut garder à l'esprit qu'une nouvelle catastrophe pourrait déjà se produire demain. Les inondations de l'année dernière ont clairement montré que le cadre actuel ne répond pas aux attentes de la société et aux besoins des citoyens, qui comptent sur une indemnisation complète des dommages qu'ils ont subis. 
 
Heidi: Des négociations sont actuellement en cours avec les différentes autorités, fédérales et régionales, au sujet d'un nouveau cadre légal. Il va sans dire que, pour nous, assureurs, il est plus qu'urgent de parvenir à un cadre clair, viable, stable et offrant une sécurité juridique à long terme. Pour nous, assureurs, les grands principes du cadre actuel restent inchangés. Je pense surtout au principe selon lequel l'ajout obligatoire de la couverture des catastrophes naturelles à l'assurance incendie permet de répartir le risque sur l'ensemble de la population et de mettre en place un mécanisme de solidarité pour assurer les habitations dans les zones à risque. En outre, il est également clair pour nous qu'une indemnisation large et complète ne peut avoir lieu que dans le cadre d'une coopération entre les assureurs privés et les pouvoirs publics, chacun assumant sa responsabilité. Pour nous, il s'agit-là des piliers pour continuer à offrir à tous les citoyens une assurance contre les catastrophes naturelles à une prime abordable. Les discussions portent maintenant sur la manière de répartir les efforts sans rendre les primes impayables pour les membres les plus défavorisés de la société. 

Et à plus long terme ?

Heidi: Beaucoup de choses dépendront de la manière dont notre société fera face aux risques climatiques et adaptera son comportement. Je pense par exemple à l'aménagement du territoire, aux normes de construction, mais aussi à la création davantage de zones inondables et d'autres formes de contrôle de l'eau. Bien plus qu'auparavant, nous devrons tenir compte de l'impact éventuel des inondations et des tempêtes. Il me semble qu'on assiste à un début de prise de conscience à cet égard. Espérons que cela se traduira également par des projets concrets. 
Bien entendu, de telles initiatives coûteront de l'argent. Il suffit de penser à tous les changements d'infrastructures routières et hydrauliques qui seront nécessaires.  Mais ne rien faire coûtera encore plus cher ! En outre, les assureurs sont certainement prêts à assumer leur responsabilité sociale dans ce domaine également, dans la droite ligne de leur politique d'investissement. Nous investissons déjà des milliards, notamment sous la forme de partenariats public-privé, dans les logements sociaux, les transports publics, les énergies renouvelables, etc. Nous sommes prêts à collaborer avec tous les gouvernements dans le cadre de projets d'infrastructures destinés à lutter contre le changement climatique également. 

Enfin, ne devrait-on pas accorder plus d'attention à la prévention ?

Heidi: Naturellement. Et là aussi, il existe des possibilités de collaboration. Tout d'abord, dans le domaine des données. Les assureurs comptent aujourd'hui 15 ans d'expérience en matière de catastrophes naturelles et disposent donc de nombreuses données utiles. Où se situent les points les plus critiques ? Où serait-il préférable de construire ou ne pas construire ? Ce genre de questions. Ces données pourraient certainement être exploitées d'une manière ou d'une autre pour soutenir les futures politiques de gestion de l'eau et d'aménagement du territoire. Nous avons aussi acquis beaucoup d'expérience en matière de sensibilisation et d'information des citoyens et des entreprises sur les mesures de prévention.  Là encore, nous voyons un intérêt commun à renforcer cette approche, et nous pensons que les assureurs ont leur rôle à jouer.

A l'occasion du premier anniversaire des inondations en Wallonie, Heidi Delobelle, CEO, a publié une carte blanche intitulée « 1 an après les inondations… Travaillons ensemble ! » (voir annexe dans la colonne de gauche).

 
     
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